Memoire Et Souvenirs
Essay by people • December 27, 2011 • Essay • 2,032 Words (9 Pages) • 1,167 Views
L'homme accorde beaucoup d'importance à son passé. En effet, on constate un profond attachement aux souvenirs, et la nostalgie que nous ressentons en nous remémorant certains événements nous montre bien que notre passé a une place importante dans notre vie. De même, l'intérêt que nous portons à la mémoire collective démontre que les époques révolues conservent une forte emprise sur notre présent.
Pourquoi un tel attachement pour nos souvenirs? Pourquoi revenir sur le passé?
Nous verrons tout d'abord ce qui nous amène à nous remémorer le passé de façon intentionnelle, puis quels sont les facteurs qui poussent notre mémoire à fonctionner lorsque nous n'en exprimons aucune envie, enfin nous étudierons les dangers de ces retours dans le passé involontaires.
Lorsque nous revisitons le passé de manière volontaire, il s'agit très souvent d'en faire un échappatoire. En effet, notre mémoire peut devenir un point de fuite lorsque notre présent est désagréable. Notre imagination nous permet de nous éloigner d'un espace et d'un temps qui nous mettent mal à l'aise, en substituant aux sensations que nous rencontrons dans l'instant présent des sensations disparues, mais que nous estimons plus plaisantes. Cela peut aller du souvenir du goût du chocolat lorsque le réfrigérateur est vide à la réminiscence du confort et de la sécurité maternels lorsque nous nous trouvons dans une situation dangereuse. Nous utilisons notre passé pour rejeter notre présent ; ou bien pour fuir un futur effrayant. En effet, notre mémoire peut parfois nous éloigner d'un présent pourtant agréable. Il s'agit en réalité d'une réponse à un phénomène d'anticipation : notre satisfaction présente devant fatalement prendre fin, nous évitons de songer à ce futur plus ou moins proche en lui préférant le passé. Car le passé a un aspect rassurant, en opposition au futur inconnu. S'étant déjà déroulé, notre passé nous est connu, or il nous est impossible de prévoir véritablement l'avenir. Tout au plus pouvons-nous nous efforcer de rendre un futur plus probable qu'un autre. Aussi est-il plus agréable de penser au passé : il s'agit de données connues, qui ne peuvent pas connaître de modifications imprévues.
Cependant, le passé ne consiste pas seulement en un échappatoire du futur. En effet, la mémoire peut devenir un moyen de contrôler ce dernier. C'est le cas de la mémoire collective, qui permet de conjecturer les événements à venir. On se base alors sur une idée de causalité entre le faits, et l'on considère qu'un même acte, dans des circonstances similaires, aura les mêmes conséquences que dans le passé. La connaissance de notre histoire collective devient alors une arme qui nous permettra d'éviter des erreurs déjà commises en d'autres temps et d'autres lieux. Ainsi, lorsque nous prenons conscience des massacres qui ont eu lieu durant la Seconde Guerre Mondiale, cela nous permet de prévenir et d'éviter une nouvelle horreur de la même ampleur. Notre passé nous permet ici de construire notre futur.
Mais, plus que cela, il nous permet aussi de comprendre notre présent. En effet, le passé est le socle de ce que nous sommes aujourd'hui, qu'il s'agisse de passé collectif ou individuel. Ainsi, les civilisations actuelles sont le reflet des ères précédentes : par exemple, notre système politique actuel résulte d'événements anciens, qui l'ont peu à peu formé. De même, c'est notre passé personnel qui nous permet de nous construire. Celui qui perd son passé perd un peu de lui-même, car le passé représente la consistance du moi, dans sa continuité. Sans passé, nous n'avons plus d'identité. Ce sont nos expériences qui font de nous ce que nous sommes. De fait, revenir sur notre passé, c'est chercher à saisir cette notion mouvante qu'est notre ego. C'est pour cette raison que notre mémoire individuelle possède une telle importance : elle est une part de nous. Elle est ce qui nous permet de comprendre nos propres réactions, nos propres sentiments. De plus, ce sont nos souvenirs qui nous permettent de moduler notre personnalité, qui se structure autour de ce qui reste présent à notre mémoire.
Ainsi, notre mémoire nous permet de fuir notre présent, ou encore de conjecturer notre avenir. Notre passé est ce qui nous crée, et c'est un peu de conscience de moi-même qui me revient avec chacun de mes souvenirs.
Mais ces différents emplois de la mémoire n'apparaissent que lorsque le rappel du souvenir est intentionnel, or la mémoire n'obéit que rarement à la volonté. Le plus souvent, au contraire, il s'agit de réminiscences involontaires. Pourquoi notre mémoire agit-elle ainsi, sans tenir compte de notre volonté propre?
Notre capacité à nous souvenir résulte en fait d'une fixation dans notre subconscient des éléments que nous percevons. Mais la majorité de ces fixations sont inconscientes et mécaniques, et s'opposent à une fixation intelligente qui résulte de la compréhension. Ainsi, le but du publicitaire est de fixer dans le subconscient du consommateur des suggestions le poussant à acheter telle ou telle chose, de manière totalement inconsciente. En effet, si elles ont plus faibles que les fixations intelligentes, car elles ne peuvent être ramenées à la conscience par la logique, comme ce serait le cas pour une leçon de physique par exemple, les fixations inconscientes n'en restent pas moins ancrées dans notre mémoire. Tout est là, en nous, et l'on n'oublie rien de ce que l'on a vécu. L'hypnose montre effectivement qu'il est possible de suggestionner une personne pour qu'elle retrouver des souvenirs qui restent inconscients dans son état normal. L'hypothèse de Bergson d'une "mémoire totale" renvoie donc bien à une réalité. De fait, il est tout à fait normal que nous ayons des réminiscences d'événements que nous croyions avoir oubliés.
Or, la majorité de nos souvenirs reviennent à notre conscience par rappels spontanés, sans être sollicités consciemment. Cette résurgence non maîtrisée de la mémoire peut prendre plusieurs formes. On parle tout d'abord d'associations d'idées lorsque notre esprit saute d'une chose à une autre selon une logique qui ne nous apparaît pas forcément. Il apparaît ici que nous possédons en nous des souvenirs qui peuvent être convoqués par association avec un élément présent à notre conscience. Nous disons alors qu'une pensée «me rappelle» quelque chose, une chose qui n'est en réalité rien d'autre
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